
Valérie Solanas
Barbare ?
Pourquoi connait-on encore Valérie Solanas ? Qui est-elle sinon la dingue qui a tiré sur Warhol en juin 1968 ? Ce fait d’arme est le premier matériau de l’épitaphe de Solanas, avant son oeuvre littéraire dont le SCUM manifesto* est le fleuron. Qui était Solanas ? Une ratée dévorée par le ressentiment social et une envie de pénis frustrée ? Une complotiste schizophrène ? Une « Robespierre du féminisme » à écouter Norman Mailer qui s’y connaissait en violence et en femmes, lui qui a tenté de buter la sienne à coups de couteaux et dit que la grande littérature s’écrivait « avec le résidu de nos couilles ». Première leçon du féminisme : plus les misogynes vous dégueulent dessus, plus il y a de chances que vous soyez l’opposé d’un paillasson. Tant en notre Royaume, à l’instar du paradis, les dernières seront les premières.
Il y a beaucoup à découvrir sur Solanas. A-t-elle shooté Wharhol comme Erostrate incendié le temple d’Artémis, pour s’arroger la célébrité par la violence ? Ou parce que Warhol tel n’importe quel peigne-cul puissant la faisait mariner à côté de son téléphone comme n’importe quelle femme désireuse d’amour et de gloire ?
Elle refusa avec éclat « la féminité telle qu’elle est écrite par les hommes et jouée par les femmes ». Et le SCUM manifesto est une oeuvre admirable, intellectuellement surpuissante, opérant ce renversement des valeurs, cette destruction des « vieilles tables » à laquelle Nietzsche invitait. Pute, lesbienne, criminelle mal embouchée, diagnostiquée cinglée, Valérie Solanas fut une intellectuelle de première classe. Et ce que le langage patriarcal appelle sa barbarie, c’est la liberté et la Vie dans le nôtre. À l’heure où le féminisme médiatique a décidé de nous reclouer dans le cercueil de la pâle victime sanctifiée par le martyre, je vous propose de nous éclater comme des malades dans un atelier d’écriture où nous nous droguerons à Solanas, la fumerons, la snifferons, la fixerons, la boirons à la paille. Vive Solanas ! Vive SCUM ! Vive le vrai féminisme !